Le pont des soupirs de Richard Russo
Richard Russo
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jean-Luc Piningre
Quai Voltaire, 2008
Lu en poche, collection 10/18
827 pages
Première lecture de cet auteur, ce n’était pas faute de l’avoir croisé sur les blogs que je fréquente avec assiduité, mais je n’avais jamais franchi le pas jusqu’à cette proposition de lecture commune lancée par Ingannmic.
Et bien je lui dis merci !
Moi qui avais un mal fou à me concentrer sur un roman ces derniers temps, qui ne pouvait avaler plus de trente pages d’affilée, et bien là, Richard Russo m’a ferrée dès les premières lignes.
J’ai plongé et replongé avec délice dans les pages de ce pavé. Quel bonheur renouvelé de savoir que j’allais y passer quelques heures de suite !
Pour quelles raisons ?
L’atmosphère d’abord et surtout. Cette faculté incroyable qu’a l’auteur de faire vivre son lecteur au sein de cette petite ville de l’état de New York, Thomaston, une ville découpée en quatre quartiers selon les classes sociales, les noirs, les pauvres, ceux qui s’en sortent à peu près, les riches. Une ville où l’on pourrait s’ennuyer, et bien non, pas une seconde je n’ai cédé à l’ennui, à l’envie d’accélérer ma lecture, j’étais bien, tout simplement bien, au rythme lent des souvenirs de l’enfance du personnage principal.
Et puis cette famille, les Lynch, des personnages on ne peut plus attachants avec leurs qualités mais surtout leurs défauts. Des gens ordinaires, avec des vies ordinaires dans une bourgade ordinaire. Louie C. Lynch nous raconte sa version, mais on sent bien qu’il ne nous dévoile pas tout. Sarah, sa femme, et Bobby son ami d’enfance compléteront à leur manière les blancs. Car tout est une histoire d’angle, de regard, si le surnommé Lucy raconte sa vie à la première personne (puisqu’il écrit ses mémoires en quelque sorte), l’histoire nous est aussi racontée par la voix d’un narrateur omniscient mais qui voit tout par le prisme du personnage sur lequel il se centre, Bobby ou Sarah. La narration éclatée entre flash-back et lumière braquée sur l’un ou l’autre des personnages rend l’histoire addictive et vivante.
Louie C. Lynch est l’anti-héros par excellence, il est mou, il ne brille pas par son charisme, ni par ses actes mais il est tendre, et sa voix n’en que plus authentique. Il nous fait partager ses doutes, ses déboires, ses réflexions, ses absences, ses déceptions et ses lâchetés.
Richard Russo est un conteur magnifique, il a la générosité de nous laisser nous immerger dans son univers. Il n’est ni complaisant dans sa description des petites villes provinciales américaines, ni cynique. Il dépeint des vies, sans jamais juger. Il montre la cruauté des uns et des autres sans étalage, sans insister lourdement. Même si la scène du lynchage du jeune noir devant les yeux ébahis des spectateurs sans qu’aucun ne lève le petit doigt, me restera en mémoire. Richard Russo est un orfèvre, il cisèle avec finesse sa partition et nous la décline avec talent.
Je ne sais pas si j’ai réussi à rendre compte de mon plaisir de lectrice mais je suis sûre que je reviendrai avec joie vers Richard Russo dès que le besoin se fera sentir.
Je vais faire ma fainéante : tous les liens de cette lecture commune sur plusieurs titres de Russo sont chez Ingannmic.
Richard Russo déçoit rarement en effet 🙂
Apparemment ce titre en a déçu plus d’un aujourd’hui… Mais pas moi !
Merci pour ce billet qui met le doigt sur ce que tu as aimé, et donc sur ce qui m’a peut-être échappé. Où est-ce juste une autre appréciation des choses…
Tant mieux si j’ai réussi à dire ce que j’ai aimé dans ce roman.
Chicchic! Ce n’est pas mon préféré de l’auteur, mais j’ai aimé, bien sûr!
Et oui, tu es une grande fan de cet auteur !
Ça donne envie de découvrir cet auteur, je vais m’y intéresser. Merci 😊
De rien ! 😉
Oh si, le plaisir que tu as pris à cette lecture est clairement exprimé, et me donnerait presque envie de le relire pour comprendre ce qui m’a échappé ! Tu ne peux savoir à quel point ton billet me ravit, tant j’étais navrée du peu d’enthousiasme qu’avait suscité cette lecture, y compris chez moi .. Si celui-là t’a embarquée, je ne peux que t’encourager à continuer avec A malin, malin et demi et Un homme presque parfait qui devraient te régaler !
Merci !!
Je suis sûre que les autres vont me plaire ! J’aime ce genre de littérature. Vivement que les librairies et les bibliothèques rouvrent.
Ton plaisir à lire est un plaisir à lire :). Hélas, c’est le seul titre que j’ai tenté de l’auteur, et ce fut un abandon ( souvenir confus, c’était il y a longtemps ). Il faudra bien que je tente à nouveau avec un autre de ses romans.
Oui peut-être pourrais-tu tenter à nouveau avec ces titres dont tout le monde parle.
On ne peut pas dire que tu sois raccord avec Ingannmic ! C’est chouette qu’il t’ait redonné goût la lecture. Tu n’as plus qu’à continuer 😉
Non, on n’est pas raccord, mais c’est grâce à elle, entre autres, que j’ai découvert cet auteur et ça, c’est très appréciable et je l’en remercie.
eh bien! je suis contente pour toi, je crois qu’on a tous eu un gros passage à vide… Je n’ai jamais lu cet auteur, enfin, je ne crois pas mais tu m’as bien tentée!
Ça fait du bien de retrouver le goût de lire, il ne me reste plus qu’à le garder…
Je ne sais pas pourquoi le charme de Russo n’agit pas sur moi… j’en ai abandonné quelques-uns, ça ne doit pas être mon genre, mais à chaque fois que je lis des supers retours j’ai envie de réessayer…
On a tous nos auteurs favoris et nos auteurs moins appréciés, ceux qui ne nous font pas vibrer…
Je crois que je n’ai lu que Le déclin de l’empire Whiting, il y a longtemps, et beaucoup aimé. Il va falloir que je remette Richard Russo en haut de la pile 😉
Oui, cela s’impose ! Visiblement il a écrit des romans fabuleux, en dehors de celui-ci qui est loin de faire l’unanimité.
J’avais tellement aimé A malin malin et demi, je vous aurais volontiers suivi dans cette LC mais les biblis étant fermées, j’ai raté le coche. Bon ceci dit, malgré ton enthousiasme, les avis des autres colecteurs ne m’encouragent pas trop à emprunter le Pont des soupirs.
Non, peut-être pas celui-ci mais Un homme parfait pourrait te convenir puisque c’est le même personnage que dans A malin, malin et demi, si j’ai bien compris.
Si tu as aimé celui-ci, (le seul qui ne m’a pas convaincue, que je n’ai pas fini) tu pourras te précipiter sur les autres… bientôt !
Dommage que tu ne l’aies pas fini, parce que la fin est drôlement bien !
Ton avis est enthousiaste par rapport aux autres lecteurs ….
Pourquoi pas se faire son idée soi même alors ?
Bonne journée
Exactement, il faut lire pour savoir si on aime… et ne surtout pas penser que parce que quelqu’un dont on est proche littérairement parlant n’a pas aimé, on n’aimera pas…
J’ai bien envie de me faire ma propre idée, moi aussi!
Ses personnages semblent toujours aussi attachants.
Pour notre lecture commune, j’ai préféré poursuivre avec « À malin, malin et demi », histoire de replonger dans le monde tant apprécié de « Un homme presque parfait ». Pas déçue, la fille.
Cet homme presque parfait et A malin, malin et demi, si je les avais sous la main, c’est sûr que je les lirais.
Je l’ai découvert il n’y a pas très longtemps avec Trajectoires, 4 nouvelles et j’avoue avoir été séduite par l’écriture, un auteur que je retrouverai avec plaisir 🙂
Et moi aussi !
j’ai tellement aimé » Le déclin de l’empire Whiting » que si je pouvais je me plongerais bien dans ses autres romans. Ton billet est très tentateur.
Moi aussi j’ai hâte de me plonger dans ses autres romans, dès que je le pourrai.
Apparemment, tu as aimé Lucy. Moi, je lui ai préféré Tessa, sa mère, de loin !
J’ai aimé tous les personnages, tous, avec leurs fêlures et leur fragilité mais si je devais en retenir une, ce serait peut-être Sarah parce qu’elle est lumineuse.
Tu es la seule à être si enthousiaste. Je suis avec attention les billets sur Russo que je compte mieux découvrir, donc malgré ton avis je pense plutôt tenter un titre sur lequel les avis sont plus positifs.
Je comprends, je comprends…
Voilà qui me donne envie de découvrir cet auteur.
Tant mieux !
Si si, tu transmets bien ton enthousiasme sois certaine de cela!
Je n’ai jamais lu cet auteur mais tu me pousses à renverser le cours des choses…
Ah oui, c’est un auteur à découvrir, sans nul doute.
Je ne l’ai jamais lu non plus. Un auteur de plus à découvrir !
Et oui !
J’ai adoré ce roman, lu il y a plusieurs années. Je ne sais pas trop si j’aurais pu me concentrer dessus ces temps-ci, mais j’en garde un excellent souvenir!
Ah bah voilà, je ne suis pas toute seule ! Merci Karine !
Tu sembles t’être régalée avec cette lecture, un auteur qu’il faut absolument que je découvre à mon tour!
Ah oui absolument !
Je vois qu’Ingannmic et son initiative autour de Richard Russo font beaucoup d’émules dans la blogosphère :-). J’ai loupé le RDV mais je me promets de découvrir cet auteur très bientôt. En tout cas, ton enthousiasme est perceptible !
Et j’espère bien continuer à découvrir cet auteur.
Dommage, trop « pavesque » pour moi !
Je viens de le finir et je suis tout aussi emballée !! je mets ton billet en lien mais… je ne publierai le mien que cet été, pour le challenge de Brizé ;))
Ah ah ! Le pavé de l’été ! Je suis ravie de constater que je ne suis pas la seule à l’avoir autant apprécié.
Un livre lu il y a quelques années et beaucoup aimé !! 😉