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La couleur des sentiments de Kathryn Stockett

27 décembre 2010

traduit par Pierre Girard, 2010, ed Jacqueline Chambon, 526 p.

 

 

« The Help » en anglais. Mais pourquoi l’avoir changé ce titre original ?

 

Et voilà, je l’ai lu. C’est une histoire très prenante, on a beaucoup de mal à fermer le livre (et pourtant il le faut bien, il est un peu long pour le lire d’une traite !). Et si on le pose, c’est pour respirer un peu, sortir de cette chaleur moite et cette tension et surtout pour mieux s’y replonger quelques heures (ou minutes) plus tard.

C’est un livre de femmes sur les femmes. Un magnifique hommage à leur courage, à leur ténacité, à leur générosité. Mais c’est aussi une jolie satyre des femmes blanches du Mississipi, celles qui ne pensent qu’à leur apparence, celles qui sont artificielles et qui répandent « la bonne parole » qu’on leur a inculquée depuis qu’elles sont toutes petites. L’hypocrisie, le mensonge, les coups-bas sont le quotidien de ces femmes qui méprisent les noirs (ce qui est normal dans cette société-là, à cette époque-là) mais qui méprisent aussi les parvenues blanches, celles qui ne sont pas de leur milieu, qu’elles jugent plus vulgaires qu’elles.

Ce que j’ai préféré dans ce roman, c’est sa façon de montrer que les relations entre ces différentes communautés n’est pas faite que de haine, ou d’amour mais d’un subtil mélange des deux. Aucun manichéisme. On peut mépriser les Noirs mais avoir pour sa bonne des petits gestes attentionnés. Plus encore, c’est la relation entre les enfants et leur bonne noire (et là on sent du vécu) qui est décrite avec justesse et profondeur.

On vibre avec les personnages, on a peur pour elles, on tremble avec elles lorsqu’elles croisent le chemin de la terrible Miss Hilly, on rit avec elle, on a envie de remuer Miss Celia, de lui ouvrir les yeux…

J’ai eu très peur que l’histoire d’amour vienne gâcher le tableau… Heureusement, non ! En fait, c’est là la réussite du livre : il ne verse jamais dans le pathos, il ne dégouline pas de bons sentiments, il est authentique.

L’intérêt principal du roman réside dans le récit de l’écriture d’un livre par une jeune femme blanche et des bonnes noires. Chose impensable au Mississipi dans les années soixante ! Jusqu’au bout, l’auteure ménage le suspense. On veut aussi savoir, à tout prix, pourquoi Constantine est partie avant le retour de Skeeter, quelle Chose Abominable Epouvantable Minny a faite…

Mais, si j’ai énormément aimé l’intrigue, j’ai été quelque peu déçue par l’écriture. L’auteure a choisi de faire parler deux femmes noires et une blanche mais à mon avis, elle n’a pas toujours su se glisser dans la peau des bonnes noires. On aurait aimé une voix à la Toni Morrison ou encore à la façon dont André Brink avait écrit Un turbulent silence (le livre polyphonique le plus palpitant et le mieux écrit sur l’esclavagisme et la condition des Noirs en Afrique du Sud). Leur langue n’est pas assez imagée, il manque quelque chose que je ne sais pas définir.

Je me rends compte en écrivant ces derniers mots que j’exagère, mais c’est ce que j’ai ressenti pendant la moitié du livre. Puis, au fur et à mesure que j’avançais dans l’histoire, prise par l’intrigue, happée par les histoires entre les personnages, je n’y ai plus pensé. C’est donc bien que j’exagère…

Conclusion de tout ça : un très bon roman !

 

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